Traduction eucaryote

Le profil d'expression des gènes diffère profondément en fonction du tissu, de l'âge, du destin cellulaire et de son statut métabolique. Des protéines spécifiques sont synthétisées pour chaque état cellulaire. Elles permettent d'effectuer les fonctions requises non seulement pour que la cellule prolifère ou se différencie mais aussi pour qu'elle réponde aux variations de son environnement et aux stress.

En plus de sa régulation transcriptionnelle, l'expression des gènes est régulée au niveau post-transcriptionnel par des processus tels que la traduction et la stabilité des ARN messagers. Notre équipe étudie les mécanismes de régulation de la traduction qui influent sur l'expression des gènes et le destin cellulaire. Nous nous intéressons en particulier au rôle des facteurs de terminaison de la traduction dans le contrôle traductionnel d'ARNm portant des petits cadres de lecture (uORF) dans la région 5' non traduite (5'UTR), au mécanisme de dégradation cytoplasmique de ARNm, et depuis peu, aux mécanismes qui permettent à la cellule de réparer ou d'éliminer les ARN endommagés par un stress génotoxique.

En savoir plus...

Au cours de dernières années, notre équipe a étudié la terminaison de la traduction chez les mammifères. Nous nous intéressons actuellement au rôle potentiel des facteurs de terminaison dans la régulation de la croissance et de la prolifération cellulaire.

Chez les eucaryotes deux facteurs de terminaison, eRF1 et eRF3, sont indispensables pour achever la synthèse protéique. ces facteurs s'associent en un complexe qui se fixe au ribosome quand un codon stop entre au site A. Le facteur eRF1 reconnait les trois codons stop (UAA, UAG et UGA) au site de décodage du ribosome et active son centre peptidyl-transférase qui déclenche l'hydrolyse du peptidyl-ARNt libérant le polypeptide néo synthétisé. Le facteur eRF3 qui appartient à la famille des petites GTPases, stimule l'activité d'eRF1 de façon dépendante du GTP.

En plus de son rôle dans la traduction, eRF3 a été associé chez la levure comme chez les mammifères à la régulation du cycle cellulaire, la prolifération et l'apoptose. Depuis plusieurs années, nous avons entrepris de comprendre comment le facteur eRF3 peut être impliqué dans la régulation du cycle cellulaire.

Résultats importants

Par des d'expériences d'interférence à ARN ciblant l'ARN messager d'eRF3, nous avons montré que la déplétion d'eRF3 dans les cellules humaines induit l'arrêt du cycle cellulaire en phase G1, un diminution de la traduction globale et une hypo phosphorylation de deux cibles directes de la protéine kinase mTOR : la protéine 4E-BP qui lie le facteur d'initiation de la traduction eIF4E et de la kinase S6K qui phosphoryle la protéine ribosomale S6. ces résultats suggéraient que la déplétion d'eRF3 inhibait la progression du cycle cellulaire a travers l'inhibition de la voie de signalisation mTOR (Chauvin et al., MCB 2007). Rappelons qu'en régulant la synthèse protéique, la voie de signalisation mTOR contrôle la croissance et la prolifération cellulaire.

L'analyse par puces à ADN des ARNm des cellules déplétées en eRF3 a ensuite révélé une augmentation du niveau des ARNm exprimés à partir de promoteurs sous le contrôle de l'activateur de transcription ATF4. Nous avons montré que la déplétion d'eRF3 modifie la régulation traductionnelle de l'ARNm d'ATF4 à de petits cadres de lecture (uORFs) situés sur sa région 5' non traduite et induit une augmentation de la traduction et de l'activité d'ATF4. Enfin, nous avons démontré que c'est l'augmentation de l'expression du gène codant la protéine REDD1, une des cibles d'ATF4, qui est responsable de l'inhibition de la voie mTOR dans les cellules déplétées en eRF3.

Ces résultats mettent en évidence les mécanismes moléculaires qui lient la déplétion d'eRF3 à l'inhibition de la voie mTOR et donne un premier exemple d'activation d'ATF4 qui court-circuite la cascade de signaux passant par la phosphorylation du facteur d'initiation eIF2 (Ait Ghezala et al., NAR 2012).

Projets

  • Terminaison de la traduction et stabilité des ARNm

Pour compléter nos précédents travaux sur les facteurs de terminaison de la traduction, nous nous avons maintenant entrepris de caractériser, par des analyses in vitro et dans des cellules humaines en culture, les relations entre la terminaison de la traduction et la désadénylation des ARNm

  • Terminaison de la traduction, ARNm portant des uORF et destin cellulaire

A la suite de notre travail récent sur les uORF d'ATF4, nous nous sommes intéressés à d'autres régulateur transcriptionnels qui sont régulés par des uORF. Nous étudions actuellement l'implication ces régulations traductionnelles dans l'expression de gènes qui gouvernent le destin cellulaire.

  • Stress génotoxiques et dommages de l'ARN

Les stress génotoxiques n'induisent pas seulement des lésions de l'ADN qui provoquent la synthèse de transcrits mutants mais provoquent aussi des dommages aux molécules d'ARN causant des défauts de traduction. Notre projet est d'identifier les mécanismes qui préviennent les effets toxiques des dommages de l'ARN et d'étudier leurs effets potentiels sur le devenir cellulaire et le vieillissement.

Collaborations

  • Olivier Namy, Institut de Génétique et Microbiologie, UMR8621 CNRS-Université Paris-Sud Orsay
  • Djemel Hamdane, Chimie des Processus Biologiques, CNRS UMR 8229 Collège de France, Paris