Régénération et croissance de l'axone

Une lésion du système nerveux des mammifères est connue pour déclencher une série d'événements typiques qui perturbent inévitablement l'environnement neuronal, phénomène qui influence à son tour le remodelage des neurones et de leurs axones, qu'ils soient eux-mêmes lésés ou indirectement affectés.

La dégénérescence des axones est l'événement pathologique pivot de la lésion neurale traumatique aiguë ainsi que de nombreuses maladies neurodégénératives chroniques. C'est un programme cellulaire actif, et pourtant moléculairement distinct de la mort cellulaire. Beaucoup d'efforts sont consacrés à la compréhension de la nature de la dégénérescence des axones et à la promotion de la régénération des axones. Le transport axonal antérograde et rétrograde couplant les terminaux synaptiques éloignés avec le soma cellulaire est essentiel pour la différenciation, la survie et la fonction neuronales. L'importance de ces voies de trafic est soulignée par les découvertes selon lesquelles la perturbation du transport axonal, telle que l'accumulation anormale d'agrégats de protéines et d'organites le long de l'axone, est considérée comme un événement pathogène précoce entraînant la disparition des neurones. De plus, le transport axonal rétrograde est essentiel pour permettre aux neurones périphériques de se réparer après une blessure et peut être absent ou déficient en neurones du système nerveux central (SNC). L'incapacité à réparer ou à protéger les axones du SNC de la dégénérescence est restée un problème non résolu malgré un siècle de recherche et continue d'être l'un des plus grands défis des neurosciences (objectif 1). Notre expertise méthodologique s'étend des approches micro-technologiques permettant le contrôle de l'excroissance axonale et la reconstruction des réseaux neuronaux (Aim 2) aux modèles in vivo permettant d'étudier la restauration neuronale et la reconnexion des réseaux (Aim 3).

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Notre équipe a largement contribué à une meilleure compréhension des mécanismes moléculaires et cellulaires qui sous-tendent la régénération et la dégénérescence des axones liées à une blessure ou à une maladie, et cela continuera d'être l'un de nos principaux objectifs. Notre enquête récente a également inclus le développement d'approches micro-technologiques permettant la reconstruction in vitro des voies neuronales fonctionnelles humaines et de rongeurs. De plus, une stratégie de réparation qui favorise la régénération axonale dans le SNC adulte, en particulier après des lésions traumatiques, constitue le deuxième objectif de notre projet. Ainsi, à travers des approches interdisciplinaires, nos recherches futures peuvent être considérées comme reliant la recherche fondamentale et appliquée, car les deux branches sont interconnectées.

Aim-1 : Axon fate: mécanismes moléculaires impliqués dans la régénération et la dégénérescence des axones

Au cours des maladies traumatiques et dégénératives du système nerveux (SN), les neurones affectés vont dégénérer leurs axones et se déconnecter de leurs cibles. De telles lésions peuvent même se propager de neurones en neurones entraînant un affaiblissement des circuits neuronaux, même s'ils sont principalement capables de se réorganiser. Les mécanismes cellulaires intrinsèques et autonomes non cellulaires contrôlent le destin axonal sous un stress qui entraînera soit des processus de dépérissement axonal, soit des tentatives de repousse. Alors que les tentatives pour les régénérer sont généralement avortées dans le SNC, les axones lésés doivent être restructurés en formant un cône de croissance à leur extrémité distale, capable de naviguer dans un environnement neuronal adulte, et de se reconnecter à sa cible naturelle. En essayant de décrypter les mécanismes cellulaires et moléculaires en jeu lors de la dégénérescence/régénération axonale, notre objectif est double :

  1. Déterminer les mécanismes communs ou divergents qui déclenchent la régénération ou la dégénérescence après un traumatisme focal ou une condition dégénérative chronique, au niveau d'une seule cellule. L'élément central est le cytosquelette, car il détermine non seulement la forme de la cellule, mais organise également les compartiments cellulaires qui assurent le bon fonctionnement du neurone. En particulier, nous abordons le rôle du trafic intracellulaire, du transport et de la dynamique des mitochondries, en relation avec l'état des microtubules, par des études in vivo et in vitro.
  2. Étudier les conséquences de la déafférentation induite par la dégénérescence axonale sur la robustesse des réseaux de neurones. Le traumatisme axonal et l'état neurodégénératif progressif altèrent la connectivité du réseau neuronal et déclenchent la transmission de signaux délétères trans-synaptiques entre les neurones. L'impact de l'échange interneuronal d'agrégats protéiques, le rôle de la physiologie synaptique et l'interférence avec les processus de survie dépendants de l'activité sont analysés au niveau de réseaux neuronaux dont la topologie est contrôlée par des approches micro-technologiques (Objectif 2).

Aim-2 : CNS-on-Chip: Approches technologiques pour la modélisation de la dégénérescence axonale et des reconnexions neuronales

Les conditions pathologiques perturbent progressivement l'organisation du cerveau, et il est urgent de développer des modèles intégrés vivants in vitro 2D et 3D d'architectures cérébrales permettant la modélisation des maladies, la pharmacologie prédictive et l'élaboration de stratégies neuro-restauratrices pour le recâblage d'un cerveau endommagé. Grâce à des réseaux de collaboration académiques établis impliquant des physiciens, des technologues et des théoriciens, nous co-développons des prototypes de culture cellulaire microfluidique et biomatériau pour contrôler les interactions cellule-cellule. En combinant des approches microfluidiques, micro-patterning et biomatériaux permettant de contrôler la biomécanique du cytosquelette et la physiologie neuronale, nous sommes actuellement impliqués dans la conception de réseaux neuronaux 2D et 3D de topologie entièrement contrôlée à la fois chez les rongeurs et chez l'homme (dérivés d'iPSC). Ces systèmes expérimentaux comblent le fossé entre les systèmes de culture cellulaire conventionnels et les modèles in vivo. Ils nous permettent de modéliser les processus dégénératifs traumatiques et chroniques dans un environnement hautement prédictif et d'évaluer les stratégies de protection et de régénération.

Nos travaux fondateurs ont montré que l'extension des processus cellulaires (axones, extensions des astrocytes) peut être contrôlée par 1) un biomatériau bio-imprimé et 2) un micro-environnement texturé imposant des contraintes mécaniques aux neurones (3 brevets). Cela permet la création de chambres de culture cellulaire microfluidiques ou micro-motifs permettant la manipulation des neurones au niveau subcellulaire. Sur la base de notre expertise antérieure, nous avons développé un procédé de fabrication unique permettant à la fois le prototypage rapide et la production en série de dispositifs microfluidiques simples (Paul et al, 2010). Ces systèmes expérimentaux sont couramment utilisés dans notre laboratoire et sont diffusés à notre réseau collaboratif de neuroscientifiques et de biologistes cellulaires. En utilisant notre paradigme "diode axonale" qui permet le contrôle de la direction d'excroissance axonale, nous concevons des puces microfluidiques permettant la reconstruction de réseaux neuronaux fonctionnels orientés en environnement microfluidique (Peyrin et al, 2011) dont l'activité électrique est contrôlable par pharmacologique, optogénétique ou neuro-électronique. stimulation. Plus spécifiquement, nous avons développé des puces microfluidiques permettant de modéliser le traumatisme axonal et la dégénérescence axonale au niveau de la cellule unique (Kilinc et al 2010, Magnifico et al 2013, Szelechowski et al, 2014) ; ou au niveau du réseau neuronal (Peyrin et al, 2011, Deleglise et al 2013, 2014, Alleaume-Butaux et al 2015), associés à des dispositifs micro-technologiques permettant l'évaluation rapide de stratégies thérapeutiques et réparatrices.

Aim-3 : Stratégies de régénération de la moelle épinière après une lésion traumatique

Les lésions de la moelle épinière (SCI) entraînent une invalidité grave et permanente et ont des conséquences sociétales importantes. La seule thérapie approuvée pour traiter les lésions médullaires est le traitement aigu à la méthylprednisolone, qui a très peu d'impact sur le rétablissement du patient. Cela est dû en partie à la capacité limitée du système nerveux central (SNC) humain adulte à s'auto-réparer après une blessure. La recherche fondamentale a fait des progrès dans l'élucidation des mécanismes impliqués dans la neurodégénérescence et l'inflammation après une lésion médullaire et les causes limitant la régénération des axones. Ces connaissances ont servi de base au développement de modèles animaux de SCI qui, à leur tour, permettent de développer de nouvelles approches pour la réparation du SNC et la récupération fonctionnelle. La restauration maximale après une lésion médullaire ne sera atteinte que par une combinaison de thérapies, une approche qui nécessite une stratégie de recherche multidisciplinaire comme celle que nous avons établie pour nos études. Notre objectif principal est l'utilisation de nouveaux biomatériaux comme base pour créer des stratégies de réparation combinatoires uniques pour traiter les lésions médullaires. Nous avons établi une collaboration étroite avec des experts de la recherche sur les polymères naturels qui ont développé des hydrogels innovants à base de glycosaminoglycanes capables de soutenir les thérapies cellulaires et le traitement par petites molécules/médicaments des lésions médullaires (IMP, Univ Lyon 1, dirigé par Laurent David). Notre collaboration a donné des résultats prometteurs dans le traitement des lésions médullaires à l'aide d'échafaudages de biomatériau de chitosane seuls. L'implantation de notre formulation brevetée dans le tissu lésé SCI entraîne une réduction de la formation de cicatrices, une revascularisation fonctionnelle, une inflammation modulée et, plus remarquable encore, la présence d'un nombre élevé d'axones dans l'implant et la récupération fonctionnelle (brevet, thèse de doctorat et article soumis). Ces résultats confirment la capacité de notre nouvelle approche à induire la récupération de SCI expérimentale, et la faisabilité de nos études proposées pour faire progresser ce traitement pour le développement clinique futur.

Notre projet utilisera de nouvelles approches combinatoires destinées à optimiser l'efficacité d'un biomatériau en le combinant avec des médicaments neuroprotecteurs pour minimiser le dépérissement des axones et prévenir la dégénérescence progressive secondaire des neurones par thérapie cellulaire.